Bon on était peinards et on s'ennuyait ferme pendant cette grossesse, et je me trouvais obligé de martyriser des pauvres conseilleurs innocents ou de gloser sur des prises électriques et sur les recherches d'internautes pour occuper l'espace de ces colonnes. Mais là pour de vrai on commence à stresser. Ouais, ouais, un vrai sujet de stress qui n'a aucun fondement mais qui nous occupe bien la tête. Oui parce qu'on est des parents primipares (ça veut pas dire qu'on descend des singes mais qu'on en est au premier, oh ça va pas la peine de crâner moi aussi je viens de l'apprendre y'a trois minutes), donc forcément on ne sait pas à quoi ressemblent les manifestations qu'on est en droit d'attendre.

Bien sûr je parle pas de manifestations genre Bastille-Nation où qu'on se prend des gnons (celles-là j'ai décidé d'arrêter en même temps que le poids écrasant des responsabilités me tombait sur le râble par une chouette soirée de septembre sous la forme de deux putains de points roses). Non, juste des trucs qui sont censés arrivés aux femmes enceintes. Genre comme on lit des milliards de livres consacrés à la grossesse, on sait pertinemment que là maintenant mon amour-à-nichons-sensibles (oh oui vachement sensibles) devrait commencer à sentir bouger Sigmund. Mais macache. Nibe. Rien ne bouge.

Evidemment elle s'inquiète du style et si il était crevé comme un pélican qui a mangé un hareng frelaté ? Tiens justement j'ai mangé un kiwi pas très frais y'a deux jours et si ça se trouve Sigmund n'a pas supporté. Ou bien c'est cette overdose de lasagnes aux cèpes que j'avais faite y'a trois jours qui s'est peut-être coincé dans le cordon ombilical (on lit beaucoup mais des fois c'est pas très précis : le cordon ombilical je vois comme une espèce de tuyau d'aspirateur -mais sans l'embout hein ?- par lequel passe la nourriture en toutes petites boulettes). J'ai beau essayer de la raisonner, le stress s'installe dans sa tête ravagée par les hormones et se communique à la mienne ravagée par les angoisses et les coups de jus des prises électriques mal réparées. J'essaye de plaisanter et de la convaincre que Sigmund est juste un peu paresseux comme son père : regarde y'a trois jours après les lasagnes je pouvais plus bouger du tout mais pourtant j'étais pas mort, non. Oui bon d'accord j'avais les yeux révulsés, la langue pendante, je bavais et je ne respirais pratiquement plus, mais je n'étais pas mort. Ok d'accord comateux mais pas mort. La preuve j'ai écrit un billet sur mon bloug. Quoi comment ça quel bloug ? Merde je me suis trahi. Non rien, rien du tout, juste un blog de ... de... de bricolage électrique sur comment qu'on répare des menus trucs genre les prises tu vois ? Je pense que c'est intéressant de partager son savoir. Mouais c'est ça, et quand c'est que tu les répares ces prises ? Ouf, je l'ai échappé belle, mieux vaut une bonne dispute que de dévoiler ce bloug.

Bref, c'est l'angoisse totale. Même l'annonce de notre excellent score au jeu de la trisomie ne nous a pas remonté le moral. Ouaip, 1/2151, c'est de la balle. Mais bon en même temps si Sigmund est crevé comme un ragondin qui a boulotté un rat mort, ça nous fait une belle jambe qu'il soit parfaitement normal (enfin, à 2150 chances contre une, j'ai toujours eu une guigne d'enfer aux jeux de hasard genre je fais un jackpot à Las Vegas mais la machine a été vidée juste avant moi, mais c'est une autre histoire). Et bon voilà, on est suspendu au moindre mouvement de bidon, c'est malin. Je vais brûler les bouquins, je te jure. Je sens que les jours qui viennent s'annoncent longs, très longs. Putain Sigmund réveille-toi, sinon on va droit à la dépression pré-natale.