On était sur le divan hier soir en train de mater un film illégalement téléchargé sur Internet (juste un, vraiment défraichi, en plus) quand tout à coup mon amour-à-bidon-qui-dépasse-faut-voir-comme se retourne vers moi avec un air bizarre. Allons bon que je me dis, elle a le souffle qui se coupe, la douleur au côté, l'angoisse au coeur et ça y est on est reparti pour un tour aux urgences de la maternité, et j'ai même pas de poulet pour amadouer le vigile qui m'en veut, toujours pas de caddie(r) et toujours pas compris la différence entre un interne et un externe. Beuh non qu'elle me dit (déjà elle arrivait à parler, donc la respiration ça allait à peu près) c'est juste que je sens un drôle de truc...

Ah, Ah ! que je fais.

Tu crois que c'est le bébé qui bouge ? que je demande l'air extatique (je sais très bien faire l'air extatique quand je veux).

Ch'ai pas qu'elle me répond. On dirait plutôt que j'ai un espèce de petit truc, genre un lutin qui me donnerait de minuscules coups de pied.
[...]
Faut voir qu'on a beaucoup de lutins à la maison qui font des tas de trucs inouïs, comme le lutin du CPL qui court dans les prises électriques pour internet, le lutin du vide ordure qui enlève le sac plein de déchets quand tu refermes la trappe, ou bien le lutin de la danette à la vanille qui les fait disparaître quand j'ai le dos tourné. On vit dans un monde étrange mon amour-à-bidon-qui-bouge et moi. Je veux dire que les choses de la vie courante nous sont souvent étrangères, en tout cas toujours surprenantes. Donc j'en déduis qu'il y a des lutins partout, réfléchissez, c'est une approche qui en vaut une autre (comme la dame lutin qui dit "troisième étage" dans l'ascenseur, elle doit habiter là c'est pas possible, quelle que soit l'heure elle est là).

Bref. Donc voilà-t-y pas que mon amour ausculte son ventre pour savoir si ça serait pas Sigmund qui donnerait des petits coups de pied (un footballeur), de coude (un karatéka) ou de boule (un rugbyman) et non pas un lutin quelconque dont on se demanderait d'ailleurs ce qu'il foutrait là, les lutins ça va comme ça, hein, on a déjà donné (genre le lutin qui décoince le drap en bas du lit pendant la nuit et que tu te réveilles avec les pieds glacés, si je l'attrape celui-là je lui fais bouffer son chapeau. Avec ses couilles.)
Et que donc elle sentait des drôles de trucs bizarres sans savoir si le couscous de midi n'y était pas pour quelque chose. Ah oui pasque à ce compte-là, moi aussi je peux avoir un lutin qui me fait bouger des trucs dans le ventre après un bon couscous ou deux tonnes de choucroute. Sauf que moi c'est pas forcément un lutin, mais plutôt un lutinosaure affamé (les lutinosaures c'est les ancêtres des lutins, très balaises, comme les lapinosaures, quoi, faut suivre enfin !).

Et donc voilà. Elle n'a plus rien senti après. J'ai essayé de crier très fort contre son ventre "debout là-dedans" mais macache. D'un autre coté le Sigmund paraît qu'il dort à peu près vingt heures par jour (quand je vous le disais qu'il tenait déjà de moi), alors faut qu'on attende demain qu'il soit réveillé pour savoir si lui qui a bougé ou ce putain de lutin. Mais bon. Ca m'a l'air bueno. Ah ben ça, on va être soulagés. depuis le temps qu'on attendait qu'il bouge, hein ?
Je vous tiens au courant.